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Littérature de jeunesse

Arthur Ténor, invité du salon jeunesse d’Aubagne

Arthur Ténor était présent au salon du livre d’Aubagne des 17, 18, 19 et 20 novembre derniers. Auteur de littérature jeunesse, il intervient régulièrement dans les établissements scolaires où ses romans sont lus et étudiés. Romancier prolifique, il écrit aussi bien des romans historiques que de la fantasy. Retour sur cette rencontre….

Comment vous est venu cette passion pour l’écriture, cette envie d’écrire ?

Sans doute vais-je vous surprendre, mais ce n’est pas du tout une vocation de jeunesse. Au contraire, comme je le raconte souvent aux lecteurs que je rencontre, jamais de la vie je n’aurais voulu être écrivain (trop fâché avec l’orthographe). Et puis voilà, on ne choisit pas toujours son destin. C’est un peu comme la rencontre de l’amour de sa vie, cela peut vous arriver de manière totalement inattendue, sans qu’on l’ait vu venir même. Pour faire court, à l’âge de 18 ans, j’ai eu l’idée d’une histoire qui m’a, si je puis dire, complètement emballée. Cela tombait pendant des vacances scolaires. Depuis, je n’ai jamais cessé d’écrire… et d’apprendre à écrire.

Vivez-vous de votre plume aujourd’hui ? Comment se déroule une journée type pour vous?

J’en vis, oui. Croisons les doigts pour que cela dure, car il n’y a pas de profession plus précaire que celle d’auteur soumis aux aléas économiques autant qu’à une rude concurrence (je pense seulement à celle de nos confrères étrangers qui représente sûrement pas loin de 60 % à 70 % de la production française de romans pour adolescents. C’en est au point où l’on se demande si pour être publiés, il ne nous faudra pas nous exiler. A moins que les écrivains français soient moins bons… Un débat à ouvrir pour l’avenir, certainement). En ce qui concerne la journée type, je n’en ai point ! Tous les jours, ça change, au gré de mes humeurs, de mes envies, de mes obligations et autres nécessités. Même si j’essaie de m’astreindre à une discipline, il vient toujours des bricoles à faire en urgence pour casser mon immersion dans l’Imaginaire. Cela dit, une journée idéale (et non pas type) serait trois heures de relecture-écriture le matin, trois heures l’après-midi et trois heures le soir.

Vos livres sont destinés à la jeunesse bien que certains titres puissent être lus aussi par des adultes. Pourquoi écrire particulièrement pour la jeunesse ?

En effet, je suis un auteur pour la jeunesse, lu par les adultes (J.K. Rowling est à l’inverse une auteure adulte lue par la jeunesse). Cela ne s’explique pas vraiment. Question d’affinité sans doute, de style d’écriture… Peut-être, parce que j’écris plutôt des romans à l’intrigue assez mouvementée. Ce n’est pas moi qui en ai décidé, mais ma nature. Quand j’écrivais des romans pour adultes, personne n’en voulait. Du jour où j’ai découvert (plus exactement où l’on m’a fait découvrir) que j’avais une « plume » d’auteur pour la jeunesse, je me suis pour ainsi dire « révélé ». J’ai publié très rapidement et ensuite très régulièrement. Ce n’est donc pas un choix (assumé pleinement et joyeusement), mais un état de fait. « Bon qu’à ça », dirait-on.

Vos romans se déroulent très souvent dans un contexte historique précis (Moyen-âge, guerres mondiales,..). Pour quelles raisons ? Vous documentez-vous longuement ? Comment abordez-vous l’écriture de ce type de roman ?

L’histoire humaine est un fabuleux terreau d’inspiration pour un écrivain. Nous y trouvons tout, le meilleur de l’homme et malheureusement aussi le pire. Et quand le pire affronte le meilleur, cela donne les plus belles aventures du monde, ou les plus terribles. Le passé est fascinant à bien des égards pour les vivants du temps présent : comment vivaient nos ancêtres ? Aurais-je aimé vivre en ce temps là ? Si j’avais été là, qu’aurais-je fait ? etc. Par exemple, tout garçon s’est demandé à un moment ou à un autre comment il se serait comporté dans les tranchées de Verdun, ou lorsque les Allemands ont envahi notre pays en 1940. En écrivant des romans, c’est un peu comme si je montais dans une machine à voyager dans le temps. Et ça marche, croyez-moi ! Je suis revenu de l’enfer de Verdun bouleversé, du Versailles de Louis XIV époustouflé, de Thèbes sous Aménophis III émerveillé, ou encore révolté contre ce village où, dans les années 50, on martyrisait un enfant au seul motif qu’il était un « fils de Boche ».

La difficulté, mais aussi un des plaisirs, de ce type de récits, c’est de ne pas raconter de bêtises. Il faut donc se documenter rigoureusement, douter à chaque instant, vérifier, contrôler, s’assurer que… Bref, ne rien laisser passer. Si l’on n’est pas prêt à cent fois sur le métier remettre son ouvrage, mieux vaut ne pas écrire de romans historiques.

Pouvez-vous nous raconter la genèse du roman Né maudit ? A la fin de ce roman vous avez publié une interview de l’homme dont l’histoire est inspirée. Pouvez-vous nous relater cette rencontre ? 

J’ai vu un reportage télévisé traitant du calvaire de ces quelques 200 000 enfants nés de l’amour de femmes françaises et de soldats de la Wehrmacht. Quelques victimes des brimades que l’on faisait subir à ces enfants s’y exprimaient. L’une d’elle, Daniel Rouxel, m’a particulièrement touché, notamment par sa manière de s’exprimer, d’une incroyable humanité, avec simplicité et une grande lucidité, je veux dire sans rancœur ni haine. Par exemple, parlant de sa mère (qui l’avait abandonné) et de sa grand-mère (qui le faisait dormir dans le poulailler), il disait : « Pardonner ? Non, je ne peux pas pardonner. Comment pardonner le mal que l’on a fait à un enfant de sept ans. Mais je les ai comprises. » C’est avec lui que j’ai découvert que la compréhension est la plus ultime expression du pardon. Du coup, j’ai eu envie d’écrire son histoire, à ma manière de romancier. Une fois ce travail achevé, j’ai essayé d’obtenir l’avis de M. Rouxel, car je ne voulais pas trahir la cause qu’il représentait (celle des enfants de la guerre). Il a lu mon récit, ne m’a demandé aucune retouche. Il m’a juste indiqué, « ce que vous avez écrit, c’est du miel par rapport à ce que j’ai vécu. » Je lui ai alors proposé d’adjoindre à mon texte, son témoignage. Il a accepté, m’a reçu, nous avons parlé et j’ai retranscrit cela dans une interview qui figure en fin de livre. C’est saisissant. À lire absolument !

Vous travaillez actuellement sur une saga qui comportera cinq tomes au total. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Précisions : Il ne s’agit pas d’une saga, mais d’un série, en ce sens que les épisodes sont indépendants les uns des autres, les quatre premières aventures sont déjà publiées (Série des Voyages extraordinaires chez Plon Jeunesse) et j’écris actuellement un nouveau tome, mais qui précèdera les cinq autres (disons qu’il se situe aux origines). En deux mots, c’est du « grand imaginaire ». Il faut aimer les elfes, les grandes batailles médiévales, les univers à la Tolkien en somme, et les histoires d’amour impossible ! Si mon manuscrit plaît à l’éditeur, ce sera sans doute pour 2012. En tout cas, moi, je me régale dans cet univers fantastique.

Vous semblez prendre une nouvelle direction en vous consacrant à l’héroïc fantasy pure. Est-ce une évolution naturelle ou simplement un choix, l’envie de changer d’univers ?

 

Non, non, aucune nouvelle direction à l’horizon. Je navigue au gré des vents de mon inspiration et de mes humeurs. Après la fantasy, je replongerai sans doute dans l’histoire. En parallèle, je réfléchis beaucoup aux potentialités du numérique, associé à l’édition papier. Je dis bien associé, car en jeunesse, je ne crois pas trop ou pas encore au numérique pur. Et par principe je ne veux pas envisager le livre numérique ennemi du livre papier. Mon rêve serait de trouver un éditeur qui partagerait mon goût pour l’innovation, mon plaisir à réfléchir et mon ambition dans ce domaine.

Quels sont vos projets littéraires à l’avenir ?

Je suis définitivement et irrémédiablement un auteur de séries. Aussi, trottent dans ma tête plein d’idées, pour tous les goûts et tous les âges. Ma difficulté sera d’en choisir une qu’on voudra bien me publier. Et puis, j’ai à poursuivre celles en cours (A l’école des pages du Roy-Soleil au Seuil Jeunesse, ou Les Justiciers de Gaïa chez Oskar-Oslo)… Je suis comme un enfant d’Henri Verne (l’auteur de Bob Morane).

Pour aller plus loin :

 Né maudit, Arthur Ténor, éditions Nathan, 2007.

Le blog d’Arthur Ténor    http://arthurtenor.canalblog.com/

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